Serbe, 20ième siècle
Né en 1932, à Radobiljici, Macédoine; décédé en 2003, à Despotovac, Serbie.
La conscience constante de la souffrance et de la douleur, qu'elles soient physiques, psychologiques ou existentielles, définit le travail de Vojislav Jakic. C'est le cœur même du sujet de son autobiographie à demi fictive, «Sans abri» (Nemanikuce), qui s'est par ailleurs incarné dans ses premières sculptures de bois intégrant des crânes et des os et dans ses dessins parfois gigantesques réalisés au stylo à bille, aux crayons de couleur et à la gouache sur des rouleaux de papier représentant souvent des formes organiques mal définies, des êtres monstrueux à l'état d'embryon et des insectes qui fourmillent. Dans ses œuvres les plus denses, des têtes se chevauchent et s'imbriquent les unes dans les autres, des insectes et des animaux s'affrontent dans des compositions si serrées qu'elles laissent peu de place pour déterminer la surface ou la profondeur. Les œuvres de grandes dimensions s'étendent sur plusieurs mètres, mais ce sont les images minuscules qui animent la surface, ce qui suggère inévitablement une réflexion horrible et symbolique sur la vie individuelle et contemporaine.
Fils d'un prêtre orthodoxe originaire du Monténégro, Vojislav Jakiv naît en Macédoine où son père s'est installé. Il est âgé de trois ans quand sa famille déménage à Despotovac, une petite localité de Serbie où il va passer la majeure partie de sa vie. C'est là qu'il va prendre conscience des antagonismes sociaux résultant en partie des tensions entre les différents peuples et régions de la Yougoslavie et de la profession de son père dans ce pays communiste d'après guerre où la religion est considérée comme «l'opium du peuple». Mais c'est la mort qui hante le plus Vojislav Jakic. Il perd très jeune une grande sœur et un petit frère, morts de maladie. Après le décès de son père, Vojislav Jakiv se retrouve avec sa mère dans un état de grande pauvreté. Reconnu très tôt dans son village comme un artiste, il gagne un peu d'argent en peignant les portraits de personnes défuntes pour les familles en deuil. Jakic s'inscrit en 1952 dans une école d'art à Belgrade pour étudier la peinture et la sculpture, mais il fréquente l'institution de façon irrégulière et, après avoir échoué à organiser une exposition, prend le chemin du retour de Despotovac en 1957. En 1962, il se marie mais c'est une union de courte durée et il retourne vivre chez sa mère.
Jakic a été un artiste prolifique, créant des milliers de dessins qui sont unis par une sensibilité éperdue et souvent amère défiant à la fois l'artiste et ses spectateurs. Une de ses œuvres porte à juste titre cette inscription: «ceci n'est pas un dessin ni une peinture, c'est un dépôt sédimentaire de souffrance».
- Charles Russell
Expositions sélectionnées
2008, Centre Culturel de Serbie, Paris
2005, Dubuffet & Art Brut, traveling exhibition, Museum Kunst Palast, Dusseldorf, Germany; Collection de l'Art Brut, Lausanne; Museum of Modern Art Lille Metropole, Villeneuve-D'ascq, France
2001, Tenth International Biennial of Naïve and Marginal Art, Museum of Naive and Marginal Art, Jagodina, Serbia: Grand Prix for Exhibited Works
1979, Vojislav Jakic, Collection de l’Art Brut, Lausanne
Collections sélectionnées
Collection de l’Art Brut, Lausanne
Musée d'art moderne Lille Métropole, Villeneuve d'Ascq, France
Museum Charlotte Zander, Bönnigheim, Allemagne
Museum of Naive and Marginal Art, Jagodina, Serbie
Bibliographie sélective
Dubuffet & Art Brut, catalogue d'exposition, 5 Continents & Museum Kunst Palast, Düsseldorf, 2005.
The End is Near!: Visions of Apocalypse, Millennium and Utopia, catalogue d'exposition, American Visionary Art Museum, Baltimore, 1998.
Vojislav Jakic, catalogue d'exposition, Collection de l’Art Brut, Lausanne, 1979.
Publications de la Collection de l’Art Brut, fascicule 10, Lausanne, 1977.